1804-1830 – Empire et Restauration

Projet du cimetière du Mont Louis par Alexandre Brongniart vers 1810 – gravure – Musée Carnavalet, Paris

Jusqu’à la fin de l’Empire, le cimetière n’obtient pas le succès espéré. En 1804, le Père Lachaise ne compte que 13 concessions. L’année suivante, il n’y en a que 44, puis 49 en 1806, 62 en 1807 et 833 en 1812. En 1817, pour redorer l’image du cimetière, la mairie de Paris organise le transfert des dépouilles d’Héloïse et Abélard, ainsi que de Molière et de Jean de La Fontaine dans de somptueux monuments. Il n’en faut pas plus : en 1830, on décompte 33 000 concessions.

L’agent de change Pierre Jacquemart est inhumé le 4 juin 1804 dans la première concession perpétuelle. En juin 1804, la pierre tombale de Reine Fevez est posée : c’est le plus ancien monument du cimetière. A l’issue de l’année, seules quinze inhumations ont eu lieu dans des concessions, le reste relevant de la fosse commune. En 1807 a lieu l’inhumation du général Jean Joseph Ange d’Hautpoul.

En 1808 parait le « Voyage pittoresque et sentimental au champs de repos sous Montmartre et à la maison de campagne du Père-Lachaise à Montlouis » par Antoine Caillot. C’est le premier « guide » d’une longue série à venir. En 1809, on crée un «enclos israélite », séparé, à côté de la première porte, dite aujourd’hui Porte du Repos. En 1809, la mère d’un jeune officier d’un régiment de dragons, Antoine de Guillaume Lagrange, achète un emplacement pour honorer la mémoire de son fils, tombé en Pologne : une stèle, peu de temps après, offre le premier cénotaphe, la première sculpture et la première épitaphe du cimetière.

L’endroit prend ensuite le nom de « chemin du dragon ». En 1808 aussi a lieu l’inhumation du général Jacques Nicolas Gobert, sur la tombe duquel David d’Angers élève ultérieurement une statue équestre. En 1810, l’architecte Alexandre Théodore Brongniart élabore son projet d’ensemble pour le nouveau cimetière et un riche banquier, le comte Jean Henri Louis Greffülhe, y fait édifier la première chapelle. En 1811 a lieu l’inhumation du poète Marie Joseph de Chénier et en 1812, dans l’enclos juif, celle de David Sintzheim, premier grand rabbin de France.

Au Cimetière du Père la Chaise – gravure

En 1813, l’académicien l’abbé Delille donne son nom au bosquet qu’il occupe et où viennent le rejoindre l’architecte Alexandre Théodore Brongniart et le compositeur André Grétry. Suit l’inhumation de l’agronome Antoine Parmentier, en 1814. Mais la France est envahie. Le 30 mars, les élèves de Polytechnique et ceux de l’école vétérinaire établissent des pièces d’artillerie dans le cimetière. Ils veulent résister aux russes, mais ceux ci les en délogent.

La même année ont lieu les inhumations de l’écrivain Bernardin de Saint-Pierre, du poète Evariste de Parny, de l’homme de lettres et député Louis Sébastien Mercier et du bronzier Antoine Ravrio.

L’année suivante, celles de la comédienne lesbienne Mademoiselle Raucourt, du négociant Pierre Gareau, pour lequel François Milhomme édifie la première pleureuse grandeur nature, du maréchal Michel Ney, après son exécution, du général Etienne de Nansouty, de l’homme de lettres Stanislas de Boufflers. Joachim Murat, maréchal de France et roi de Napes, inhumé à Naples dans une fosse commune après son exécution, reçoit un cénotaphe au Père Lachaise.

En 1816 parait « Le champ du repos ou le cimetière Mont-Louis, dit du Père-Lachaise » par Roger père et fils. La même année ont lieu les inhumations du chirurgien Jacques Tenon et du maréchal Pierre Augereau. Les y rejoignent le maréchal André Masséna, le ministre de l’intérieur de Joseph Bonaparte, roi d’Espagne, l’espagnol Mariano Luis de Urquijo, le compositeur Etienne Méhul, l’auteur dramatique Pierre Augustin Caron, dit Beaumarchais, qui avait été initialement inhumé en 1799 dans un enclos de sa propriété. 1817 est l’année de la parution du « Guide du visiteur sentimental aux tombeaux du cimetière de Mont Louis, dit maison du Père-Lachaise » par C. P. Arnaud.

Atelier de sculpture et de marbrerie funéraire au Père Lachaise au début du XIXe siècle – gravure – BNF

1818 voit l’inhumation de la comtesse russe Elisabeth Alexandrovna Demidoff qui sera ensuite transférée dans le monument le plus imposant du cimetière, du mathématicien et ministre Gaspard Monge (qui sera transféré en 1989 au Panthéon) et du maréchal Dominique de Pérignon. 1819 voit l’inhumation de François Hue, valet de chambre de Louis XVI, du maréchal Jean Sérurier et de l’académicien l’abbé Morellet.

En 1820 parait le « Conducteur au cimetière de l’Est ou du Père-Lachaise » par François-Marie Marchant de Beaumont. 1820, c’est aussi le début de la construction de la chapelle du cimetière et de la porte monumentale par l’architecte Etienne Hippolyte Godde. L’inhumation du jeune Nicolas Lallemand, tué dans ne manifestation étudiante, est l’occasion de la première manifestation au cimetière, vaste contestation du régime. En 1820 ont aussi lieu les inhumations du député Jean Lambert Tallien, de l’amiral et ministre de la marine Denis Decrès, des maréchaux François Lefebvre et François Kellermann, duc de Valmy, et d’Aimée Franquetot de Coigny, l’inspiratrice d’André Chénier.

A partir de 1821, la restitution du Panthéon au culte catholique fait venir au Père Lachaise les célébrités. En 1822, on termine la chapelle. C’est l’année des inhumations de Valentin Haüy qui fonda la première école pour aveugles, de son frère René Just Haüy qui a fondé la cristallographie, de l’abbé et académicien Roch Ambroise Sicard, directeur de l’institut des sourds muets, de Louis Baron Desfontaines, ancien propriétaire des terrains du cimetière, et de l’astronome Jean-Baptiste Delambre. En 1823 ont lieu celles du maréchal Louis Davout, de l’horloger Louis Breguet, du baryton Pierre Jean Garat, et du peintre Pierre Paul Prud’hon.

En 1824 a lieu la première extension du Père Lachaise et parait la Promenade philosophique au cimetière du Père Lachaise par Guillaume Viennet, alors qu’ont lieu les inhumations des hommes d’état Jean-Jacques de Cambacérès et Charles François Lebrun, et d peintre Théodore Géricault. En 1825 suivent celles du philosophe Claude de Saint-Simon, de Vivant Denon, le premier conservateur du Louvre, et du général Foy. Cette dernière cérémonie donne lieu à une importante manifestation de l’opposition bonapartiste. En 1825 aussi est inhumé le cœur du peintre Louis David, son corps étant inhumé au cimetière Evere de Bruxelles (Belgique). Avec la fermeture du cimetière de Vaugirard, en 1824, on réinhume au Père Lachaise l’inventeur du télégraphe, Claude Chappe.

Veuve et orpheline au cimetière – gravure d’après John James Chalon dans Hullmandel, Le cimetière du Père Lachaise, 1822

En 1826 parait la « Promenade sérieuse au cimetière du Père-Lachaise » par G.G. 1826, c’est aussi l’année des inhumations du maréchal Louis Suchet, de l’acteur François Joseph Talma, du gastronome Anthelme Brillat-Savarin, du docteur Philippe Pinel, inventeur de la psychiatrie, et de l’homme politique François Boissy-d’Anglas. 1827 voit l’inhumation du député d’opposition Manuel qui donne lieu à des manifestations populaires, de l’auteur de chansons Marc Désaugiers, du physicien Augustin Fresnel et du général et ministre Armand de Caulaincourt.

En 1828 sont inhumés le préfet Nicolas Frochot, le général Joseph Hugo, le père de Victor, le phrénologue allemand Franz Gall et l’avocat défenseur de Louis XVI, Raymond de Sèze. En 1829 ont lieu les inhumations du politicien Paul Barras et du compositeur François Joseph Gossec.

En 1830, parait le « Véritable conducteur aux cimetières du Père-Lachaise, Montmartre, Montparnasse et Vaugirard » par N. Richard. 1830, c’est aussi l’année des inhumations de l’écrivain Benjamin Constant, du maréchal Laurent de Gouvion-Saint-Cyr, du haut fonctionnaire bonapartiste, le comte de La Valette, du ministre de la justice Louis Jérôme Gohier, et de la femme de lettres Stéphanie de Genlis.

La mode funéraire est alors aux enclos entourés d’un barrière et fleuris dans lesquels on dresse parfois des monuments, très variés : stèles, tombeau à l’antique, obélisque, sculpture, colonne surmontée d’un buste … C’est ainsi qu’apparait la marbrerie funéraire.

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Et ceux de la Restauration.

Sources : Philippe Landru. Date de création : 2005-07-07.

Photos

Le Père Lachaise

Date de la dernière mise à jour : 15 janvier 2024