Le baron Albin Reine Roussin nait à Dijon (Côte-d’Or), le 21 avril 1781. C’est le fils d’Edme Roussin, avocat au Parlement de Bourgogne et d’Hélène Masson. Il s’embarque comme mousse à l’âge de treize ans, en décembre 1793, sur la République chargée de la défense de la rade de Dunkerque.
Quelques mois plus tard, il devient novice sur la canonnière Chiffonne, employée à l’escorte des convois sur les côtes de Flandre. Au mois d’août 1794, il s’embarque comme matelot timonier sur le Tortu. Pendant vingt-huit mois sur cette frégate, il fait une campagne en Norvège, une à Saint-Domingue et des croisières dans les mers d’Europe. En décembre 1796, n’ayant pu rejoindre sa frégate déjà en mer, Roussin fait la campagne d’Irlande à bord du Trajan.
À son retour à Brest, il rentre dans sa famille pour se préparer aux examens où il est reçu aspirant de première classe (1801). Il embarque alors comme second sur le bateau canonnier le Mars. Puis il passe au commandement du Mentor, dans la flottille de la Manche. En 1802, il fait une campagne à la Martinique sur la corvette la Torche. Il passe, au retour, sur la Sémillante, frégate qui soutient cinq combats glorieux dans les mers de l’Inde.
Roussin devient lieutenant de vaisseau en 1807. Sur la côte de Sumatra, avec un canot armé de 22 hommes, il s’empare de sept bâtiments dont il en incendie deux de 26 canons. En mai 1808, Roussin passe comme second sur l’Iéna de 14 canons de 18. Le 28 octobre 1808, il rencontre la frégate anglaise la Modeste de 44 canons. L’Iéna soutient un combat de nuit de deux heures et demie à portée de fusil la Fouine. Il n’amène qu’après avoir été entièrement désemparé et coulant bas d’eau.
Le lieutenant Roussin, fait prisonnier, ne revient à l’île de France que grâce à un échange. Il embarque, le 11 janvier 1810, sur la Minerve, en qualité de second capitaine. Le 3 juillet suivant, cette frégate soutient un combat contre trois vaisseaux de la compagnie : le Ceylan, le Windham et l’ Assell. À l’apparition de la frégate la Bellone, et à ses premières volées, ces bâtiments amènent pavillon.
Les 20, 22 et 23 août 1810, la Minerve prend une part active aux combats contre les frégates anglaises le Syrius, la Magicienne, la Néréide et l’Iphigénie. Le lieutenant Roussin a accidentellement le commandement de la Minerve et prend ensuite celui de la Néréide, l’une des frégates capturées. À l’issue de ces combats, il passe capitaine de frégate provisoire.
Le ministre de la marine le confirme dans ce grade. Compris dans la capitulation de l’île de France en 1810, il débarque à Morlaix en mars 1811. On le présente à l’Empereur qui lui fait un accueil flatteur. En octobre 1811, il est nommé commandant de la frégate la Corée ; il parvient à sortir du Havre, malgré la vigilance des Anglais, le 16 décembre.
Ayant établi sa croisière à environ 20 lieues du cap Lézard, il fait, dans ces parages fréquentés, cinq prises dont une corvette de 18 canons. Le capitaine Roussin se porte ensuite sur Lisbonne dans le dessein d’intercepter la correspondance entre cette ville et l’Angleterre. Il parvient à échapper à la poursuite de deux frégates qui croisaient dans ces parages.
En croisant entre Madère et les Canaries, il capture six bâtiments. Le 28 février 1813, il ramène à Brest 396 prisonniers, après avoir fait aux Anglais un dommage estimé à 5 millions de francs. En 1814, il est chargé de conduire à Riga 360 blessés de la Garde impériale russe. Dans le cours de cette campagne, il est nommé capitaine de vaisseau. En 1815, apprenant le débarquement de Napoléon Ier à Golfe-Juan, il prête serment aux Bourbons.
Néanmoins, pendant les Cent-Jours, il accepte le commandement des fédérés de marine du port de Brest. À la Seconde Restauration, il est renvoyé sans grade et sans pension de retraite. Le nouveau ministre de la Marine, le vicomte Dubouchage, a pour lui une estime particulière et le fait réintégrer presque aussitôt.
En décembre 1816, il exploration les côtes occidentales d’Afrique. Il rectifie la position du banc d’Arguier sur lequel la Méduse vient de faire naufrage, environ 420 lieues de côtes. En 1819, il explore les côtes du Brésil. Roussin décrit l’archipel des Abrolhos et la vigie de Manoel-Luiz, écueil dangereux, et environ 900 lieues des côtes orientales de l’Amérique.
En 1821, il commande la frégate l’Amazone et la station navale sur les côtes de l’Amérique méridionale.
Pendant cette campagne, le capitaine Roussin devient contre-amiral (17 août 1822). Au mois de juin 1824, il prend, à Brest, le commandement d’une division de l’escadre du vice-amiral Duperré. Celle ci manœuvre pendant trois mois dans l’océan et la Méditerranée. En 1824, il devient membre du Conseil d’amirauté. Il fait adopter, en 1826, la création du vaisseau-école de Brest.
En 1828, il prend le commandement d’une escadre de neuf bâtiments de guerre. Celle ci doit à agir contre le Brésil afin d’obtenir du gouvernement de dom Pedro la réparation des dommages causés aux nationaux français lors du siège de Buenos Aires. Le 5 juillet 1828, il arrive devant Rio de Janeiro. Il entre dans la rade et place ses bâtiments devant la ville à 100 mètres des quais.
En moins de huit jours un traité est conclu. Il fait droit aux demandes de la France et rétablit les relations amicales qui existaient auparavant entre les deux pays. On récompense le contre-amiral Roussin du succès de sa mission par le titre de gentilhomme honoraire de la chambre du roi. Le 25 janvier 1830, l’Académie des Sciences l’admet comme membre de la section de géographie et de navigation.
Roussin a blâmé l’expédition d’Alger comme marin, mais quand elle est décidée, il demande à en faire partie, faveur qu’on lui refuse. Après les Trois Glorieuses, Roussin se rallie à Louis-Philippe. Appelé au Conseil d’amirauté réorganisé, il devient directeur du personnel au ministère de la marine (31 août 1830).
Il doit, en juillet 1831, obtenir la réparation de dom Miguel, qui refuse de reconnaître la monarchie de Juillet. Roussin force l’entrée du Tage avec une escadre composée de six vaisseaux, trois frégates, une corvette, deux bricks et un aviso. L’escadre mouille sur les quais de Lisbonne en face du palais du gouvernement. Vaincu par la force, le gouvernement cède et envoie son adhésion à toutes les demandes de la France.
En récompense de cette expédition, Albin Roussin est alors promu au grade de vice-amiral (26 juillet 1831). Puis il est nommé préfet maritime à Brest (17 septembre), puis membre du Bureau des longitudes (11 janvier 1832). Il devient ambassadeur à Constantinople en octobre 1832. Le 4 avril 1834, le roi lui offre le portefeuille de la Marine. Mais Roussin, occupé à la négociation d’un nouveau tarif douanier avec la Sublime Porte, refuse cette promotion.
En 1836, il vient en France en congé. Il prend part aux travaux de la Chambre des pairs en 1837, lorsque la rupture entre le sultan et Mehmet-Ali le rappelle à Constantinople. Il a le tort d’appuyer la note collective des cinq puissances dirigée contre le vice-roi d’Égypte, qui a les sympathies de la France. On le rappelle, le 18 septembre 1839.
Secrétaire de la Chambre des pairs à son retour, il devient ministre de la marine le 1er mars 1840 dans le second ministère Thiers. Il se retira avec le ministère le 29 octobre 1840. Pendant son administration, et malgré l’imminence d’une guerre avec l’Angleterre, il crée un service de paquebots à vapeur pour les liaisons transatlantiques.
Promu amiral à sa sortie du ministère (30 octobre 1840), il reprend son siège à la Chambre des pairs. Il s’y fait remarquer par son soutien constant au ministère. Aussi François Guizot le choisit de nouveau comme ministre de la Marine, le 7 février 1843, dans le troisième ministère Soult. Mais son état de sa santé le contraint à la démission dès le 23 juillet suivant.
Il se retire dans le Midi et cessa d’assister aux séances de la Chambre haute. Rallié, après la Révolution de 1848, à la politique du prince Louis-Napoléon Bonaparte, il entre de droit, en sa qualité d’amiral, au Sénat du Second Empire, le 26 janvier 1852. Il meurt deux ans plus tard, le 21 février 1854.
Titres : baron (octobre 1820), Pair de France (11 octobre 1832). Distinctions : Chevalier (20 décembre 1810), officier (5 juillet 1820), commandeur (22 mai 1825), grand-officier (1 mars 1831), grand-croix de la Légion d’honneur (19 janvier 1836), chevalier (1814), commandeur de Saint-Louis (1828), chevalier de Saint-Wladimir(1814), officier commandeur de Cruzero (1820).
Sources : Mullié (Charles) Biographie des célébrités militaires des armées de terre et de mer, de 1789 à 1850, Paris, 1852 ; Base Léonore (Légion d’honneur). Date de création : 2008-03-29.