POTTIER Eugène (1816-1887)
France

Auteur de « l'Internationale »

Au Panthéon des inconnus célèbres, Eugène Pottier devrait figurer en bonne place. Né le 4 octobre 1816, à Paris, d’abord ouvrier emballeur, il taquine la muse et fréquente les goguettes où, «le soir, en quittant l’établi, il va  roucouler ses essais».

Il place ses premières bluettes sous le patronage de Béranger, célèbre chansonnier (on dirait de nos jours, « auteur-compositeur-interprète »). Portant un regard critique sur ses pièces, il versifie en dilettante. Il dit d’une de ses premières chansons qu’elle est assez correcte, poncive, au demeurant mauvaise (…) suivie d’une ribambelle d’autres, aussi mauvaises.

Sa vie professionnelle est une réussite : il devient dessinateur sur tissus. Il s’installe à son propre compte avec un succès certain, éliminant la concurrence d’une manière peu banale :

«Je m’étais attiré la malédiction de tous mes confrères en poussant leurs employés, exploités par eux, à former une chambre syndicale».

Conviction politique ou opportunisme commercial ?

A la veille de la Commune, on le retrouve installé, marié avec enfants, bedonnant notable fièrement portraituré par Félix Nadar, affichant, selon le mot d’un contemporain des idées sociales d’un rouge de plus en plus pâle. En 1871, à cinquante-cinq ans, il abandonne tout, métier, famille, tranquillité de bon aloi, et devient maire du 2ème arrondissement.

Il échappe à la semaine sanglante, pendant laquelle il écrit l’ «Internationale». Caché à Paris, il fuit en Belgique, puis en Angleterre, enfin aux Etats-Unis, où il entre en franc-maçonnerie. Il revient en France, après l’amnistie de 1880, malade, ruiné. Il se consacre alors uniquement à la poésie. Avec l’aide de ses amis communards, il publie Les Chants révolutionnaires, en 1887, quelques mois avant sa disparition.

A son retour d’exil, il écrit abondamment pour dénoncer la misère du prolétariat :

« On ne connaît bien la misère qu’en la combattant corps à corps.
Ceux qui n’ont pas le nécessaire souffrent mille morts».

Il critique, toujours en vers, les scrupules de la Commune qui, trop vertueuse, se refusa à prendre dans les coffres de la Banque de France :

«Ton erreur est grande :Tu ne pris pas la Banque.»

Son arme favorite est l’ironie. Elle est féroce comme en témoigne cette Pétition des épiciers à la Constituante de 1848 :

«Complotant de grands entrepôts,
Les masses égarées se cotisent pour faire en gros achat de leurs denrées.
Si l’on doit nous ruiner, autant nous guillotiner
Protégez la boutique
Comme l’on fait tous vos devanciers
Et que la République profite aux épiciers»

Ou ce petit bijou :

«Crois-tu, quand la Commune a troué la masure, reboucher la crevasse avec un septennat ?».

Pottier meurt le 6 novembre 1887. Ses obsèques, suivies par des milliers de personnes, sont l’occasion d’échauffourées, la police ayant maladroitement tenté de saisir les drapeaux rouges portés par les participants.

L’Internationale est mise en musique par Pierre Degeyter en 1888. Pottier n’entendra donc jamais chanter cet hymne du prolétariat. Son nom s’effacera même de la mémoire collective.

Extrait (de sa demande d’admission du 2 décembre 1875 au sein de la loge franc-maçonne « Les Egalitaires » à New-York) :

« Je suis né à Paris, le 4 octobre 1816, d’une mère dévote et d’un père bonapartiste. A l’école des frères jusqu’à dix ans et à l’école primaire jusqu’à douze, c’est à mes lectures de jeune homme que je dois d’être sorti de cette double ornière sans m’y embourber. En 1832 j’étais républicain, en 1840 socialiste. J’ai pris une part obscure aux révolutions de 1848 : février et juin.

Du coup d’Etat au 4 septembre je demeurai intransigeant : pactiser avec les assassins du Droit, c’est se prostituer. Après plus de trente ans de prolétariat, je m’établis dessinateur en 1864. Les dessinateurs industriels n’avaient pas alors de chambre syndicale. A mon instigation, ils en fondèrent une qui comptait cinq cents membres avant la guerre et qui adhéra en bloc à la fédération de l’Internationale.

C’est à ma coopération à ce mouvement que je dus d’être élu membre de la Commune dans le IIe arrondissement. Jusqu’au 28 mai j’y exerçai les fonctions de maire. Après la prise de la mairie par les Versaillais je me repliai sur le XIe arrondissement. J’avais accepté sans réserve le programme de la Révolution du 18 mars : Autonomie de la Commune, Emancipation du travailleur. Je crois dans toute cette période, avoir accompli mon devoir.

Dans la lutte où tous les citoyens dévoués ont perdu la vie ou leur liberté, je m’estime favorisé de n’avoir perdu que ma fortune. J’ai passé deux ans d’exil à Londres et deux ans à Boston, tâchant d’honorer par le travail ma pauvreté et la proscription. »

Œuvres :

  • L’insurgé ;
  • Jean Misère ;
  • La toile d’araignée ;
  • Ce que dit le pain ;
  • La mort d’un globe ;
  • l’Internationale avec trois dates : 1816, 1870, 1887.

Pour écouter la mort de la Commune, chantée par Marc Ogeret

Sources : Wikipedia. Date de création : 2006-09-13.

Photos

Monument

La concession a été attribuée gratuitement par arrêté préfectoral.

Le monument, érigé en 1905 grâce à une souscription nationale, est modeste.

Inscriptions : Eugène POTTIER, 1816-1887

Photos


Date de la dernière mise à jour : 5 février 2024