PAWLOWSKI Gaston de (1874-1933)
France

phototypie dans La vie au grand air du 11 février 1904
Reporter sportif et homme de lettres

Gaston de Pawlowski nait le 14 juin 1874, à Joigny (Yonne). Il devient docteur en droit, reporter sportif, fondateur de l’Union vélocyclopédique de France et auteur de quelques livres satiriques. Dans son livre «Les nouvelles inventions», il caricature sans méchanceté les abus de la méthode scientifique. Cet ouvrage vise en particulier, outre les débuts d’une société de consommation et du gadget (déjà!), le «scientisme».

La postface de ce livre résume la position de cette dernière mouvance : démontons et classons avec méthode tous les rouages de notre montre. Il serait étonnant qu’à la fin du processus nous ne sachions pas enfin l’heure qu’il est. On trouve dans cet ouvrage des inventions surprenantes :»le mètre de poche ne mesurant que 10 cm», «la baignoire à entrée latérale», «le nouveau boomerang français» qui, pour prévenir tout risque d’accident, ne revient pas à celui qui l’a lancé…

Gaston de Pawlowski s’y montre un précurseur – mais par le verbe et non l’image – du dessinateur Jacques Carelman. Il participe aux débuts du journal Le Canard enchaîné en 1916. Il compose des ouvrages comme La philosophie du travail, et dirige trois journaux : Le Vélo, L’Opinion, Comoedia. Gaston de Pawlowski est connu aussi pour son livre Voyage au pays de la quatrième dimension (1912).

Ce roman de science-fiction, un des premiers du genre, développe le thème de la quatrième dimension, inauguré par Charles Howard Hinton en 1882 avec son essai Qu’est-ce que la quatrième dimension ?. Il y expose l’idée que le temps et l’espace ne sont que des illusions provoquées par la vision du monde à trois dimensions.

Dans le roman de Pawlowski, le narrateur raconte ses voyages dans le futur que lui permet la quatrième dimension. Il va passer par l’âge du Léviathan, du Savant absolu et enfin de l’Oiseau d’Or. Gaston de Pawlowski y développe, sans forcément les nommer, de nombreux thèmes de science-fiction devenus depuis des classiques: «les androïdes», «la reproduction artificielle», «le biomécanisme», «la dictature de la science» etc.

On peut même deviner que l’auteur a pressenti la webcam et le téléphone portable, en 1912 ! Au-delà de son aspect précurseur, ce livre est un étrange mélange de fantastique et de science-fiction, d’humour, de nouvelles et de roman, de réflexions métaphysiques et même mystiques. L’écriture est peu narrative et s’apparente à une longue fresque sur l’histoire de l’humanité, sur la nature, sur l’univers, qu’il décrit avec la rigueur d’un scientifique tout en s’armant de l’humour contre le scientisme.

A noter que le livre influence Marcel Duchamp pour son œuvre Le grand verre. Les éditions La Bibliothèque ont la très bonne idée de publier «Les Billets de Paysages animés», textes de 1906. La présentation d’Éric Walbecq et de Jacques Damade rappelle très justement l’époque dans laquelle baigne Pawlowski et souligne son influence sur Marcel Duchamp.

Composé d’un ensemble de vingt-six petits textes, le volume vibre entre poésie et dérision. Il offre un regard décalé sur ce monde en profonde transformation. Dans «Paysage urbain, sensations nouvelles», Gaston de Pawlowski trace les lignes de cette modernité dont il voit le déploiement. Le chapitre L’étrange voyage décrit le premier voyage en train du narrateur. Cela ne manque pas d’ironie et de férocité quant au tourisme balnéaire naissant. La description des milieux artistiques dans Au Salon, en trois portraits (Le riche amateur, l’amateur éclairé et Apoplexie) reste d’une cinglante actualité. Mais toujours la tendresse rivalise à cette dérision salvatrice comme en témoigne « Le port abandonné ».

Extrait (du Port abandonné) :

« Dans de grands bassins rapiécés avec des morceaux de ciel, les coques noires des bateaux se reflètent comme de larges taches d’encre coulant des quais. A la lumière crue tombant des mâts électriques ce sont des cordes, des rails, des wagons, des passerelles, des paniers et des caisses : – lait condensé – lait condensé – lait condensé. Sur le pont désert du paquebot un rat, ne connaissant que son devoir, s’avance par bonds successifs et prend possession du navire.
Maintenant le capitaine peut venir. Au hasard de la nuit les nuages passent rapides comme de longues bâches noires flottant dans le ciel. Par-ci par-là, une tache claire : des cheminées blanches, des manches à air doublées de brun. Une grue noire, à ventre rouge, laisse flotter au vent sa chevelure blanche et, pour se distraire, lève sa jambe. Et comme dans ce chaos on ne saurait discerner des hommes habillés de noir, il semble que cet infernal sabbat, abandonné à lui-même, crie, grince, souffle et dévide follement ses engrenages sans contrôle possible, au seul gré des rafales. »

Ses souvenirs d’enfance, disait-il, lui semblaient dater de Philippe Auguste… Il passe toute son enfance à Paris, suivit les cours du lycée Condorcet. Il retrace ses origines familiales et ses années de jeunesse  « Nous étions trois amis intimes qui avions vingt ans aux alentours de 1897, Bottini, Launay et moi » (n°80 de la revue Plein Chant, Bassac).

Gaston de Pawlowski s’éteint le 16 septembre 1933.

Œuvres :

  • Dans les rides du front (1917) ;
  • On se moque de nous Polochon ;
  • La philosophie du travail ;
  • Voyage au pays de la quatrième dimension (1923) ;
  • Inventions nouvelles et dernières nouveautés ;
  • Le jeune homme d’apparence chétive et la femme d’une grande beauté ;
  • Aristote à Paris ;
  • L’horloger de Brooklyn ;
  • Contes singuliers ;
  • Nous étions trois amis intimes qui avions vingt ans aux alentours de 1897, Bottini, Launay et moi… ;
  • Informations sur La Vie d’artiste…

Distinctions : chevalier (2 février 1922), officier (14 janvier 1925) de la Légion d’honneur.

Sources : Base Léonore (Légion d’honneur). Date de création : 2008-03-28.

Photos

Monument

Inscriptions :

Gaston de PAWLOWSKI, homme de lettres, officier de la légion d’honneur, 1874-1933.

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Date de la dernière mise à jour : 2 juin 2023