MANNONI Octave (1889-1989)
France

(Dominique) Octave Mannoni, voit le jour le 29 août 1899, à Lamotte-Beuvron (Loir et Cher), de parents corses. Il fait des études de philosophie à Strasbourg. Admissible à l’agrégation de philosophie, il regrettera toute sa vie de n’avoir pas réussi à l’oral. Dans les années 1920, il enseigne à la Martinique, au lycée Schœlcher. Là, il se lie d’amitié avec le poète Gilbert Gratiant, l’un des premiers à écrire des poèmes en créole. Ils fondent ensemble la revue Lucioles.

Dans les années 1930, il est professeur de philosophie à Madagascar. Là, il porte un regard original et décalé sur les rapports entre les colonisés et les colons. En 1945, il devient chef du service d’information de l’île. Dans ses attributions, il se voit confier la direction du support de la propagande officielle, la Revue de Madagascar, où il donne place à la tradition littéraire malgache. Le général de Gaulle le rappelle en France en 1944, car il préconise l’indépendance de Madagascar.

On l’affecte alors au ministère de la guerre, où il pose son chapeau sur le porte-manteau le matin et le récupère le soir. La révolte de 1947, réprimée dans le sang, lui sert de support pour une analyse des relations de dépendance en situation colonial. Il note les fantasmes inconscients que les colons plaquent sur les indigènes et la violence sous-jacente du processus de colonisation. Il la publie, en 1950, sous forme d’un essai : Psychologie de la colonisation, réédité en 1984.

C’est l’époux de Maud Mannoni qui est, comme lui, analyste de l’École Freudienne de Paris dès sa création en 1964. À la suite de sa dissolution en 1980, il participe avec Maud Mannoni et Patrick Guyomard, à la création du Centre de formation et de recherches psychanalytiques (CFRP), en 1982. Aimé Césaire critique violemment, et Frantz Fanon plus modérément, son ouvrage majeur en ethnopsychanalyse, Psychologie de la colonisation.

Le premier y fait référence dans le Discours sur le colonialisme et le second le mentionne dans Peau noire, masques blancs. Mannoni propose un modèle dans lequel le colonial européen ne parvient pas à affronter ses pairs et choisit la voie de la domination sur des colonisés vus comme inférieurs en vertu d’un racisme latent. Mannoni utilise pour synthétiser cette proposition une formule lapidaire :

« Le Nègre, c’est la peur que le Blanc a de lui-même, dans laquelle le terme nègre porte toutes les connotations de l’époque et du milieu colonial ».

En même temps, Mannoni y développe une thèse selon laquelle le colonisé attendrait et espérerait être dominé et dirigé. Il établit un parallèle entre l’attitude des Malgaches avec celle des Incas devant les conquistadores. Cette double analyse, formulée alors que l’ère coloniale française est remise en question dans les colonies, est très mal perçue par les auteurs issus de peuples colonisés.

Cependant, les tensions liées à la décolonisation s’apaisant, on voit maintenant ce livre comme une piste pour comprendre les affrontements de cultures. À la même époque, vers la fin des années 1940, il entame une analyse avec Jacques Lacan. Il en fera le récit romancé et déguisé dans Lettres personnelles à Monsieur le Directeur. Il devient alors psychanalyste. Proche de Lacan, il sait garder son indépendance. Il nourrit sa réflexion aux sources de la littérature (cf. les subtiles Fictions freudiennes) ou du théâtre (cf. Clefs pour l’imaginaire ou l’Autre Scène).

Un de ses articles célèbres, publié dans les Clefs pour l’imaginaire, a pour titre «Je sais bien, mais quand même». Il indique comment une croyance peut survivre au démenti de l’expérience. Octave Mannoni décède le 30 juillet 1989, à Paris. Il repose avec son épouse, Magdalena Van der Spoel, dite Maud Mannoni (1923-1998), psychanalyste elle aussi.

Sources : Wikipedia: Date de création : 2108-02-13.

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Date de la dernière mise à jour : 22 novembre 2022