GIES Monique (1934-2022)
France

Un pinceau contre les ravages de l’inceste

Monique Gies voit le jour le 31 juillet 1934. Le 16 avril 1977, elle quitte brutalement sa famille emménager dans une petite chambre à Paris et débuter une psychanalyse.

Très vite sur le divan, une maison d’enfance ressurgit, celle de ses grands-parents et de « NonNon », son oncle qu’elle repoussait en vain. Il l’a violée très jeune, à un âge où il n’y pas même de notions de sexualité, et elle l’avait oublié.

On parle dans ce cas-là d’amnésie traumatique. Et quand cela revient d’un coup, il faut le surmonter. Mais pour elle, c’est indicible, pour la société, inaudible, alors elle peint. De 1977 à 1978, elle peint une centaine d’œuvres dans sa chambre exiguë. Elle en expose certaines en 1979 lors d’une exposition collective organisée par la revue féministe Sorcières.

Elle décède le 3 mars 2022, à 88 ans.

Ce n’est qu’après sa mort que sa fille Marie-Christine découvre ces œuvres en vidant l’appartement. Elle les prend une par une sur l’étagère, les place au sol et voit soudainement le puzzle s’assembler. Elle « savait ». Sa mère en avait parlé un peu vers la fin, mais elle ne savait pas « vraiment ». Là, elle comprend tout : « NonNon », l’enfant, la fuite à Paris, le silence que sa mère n’a pu que garder. Alors, elle décide de faire connaître cette œuvre qui parle pour sa langue figée.

Sur de petits formats de papier aux fonds colorés, comme sur la scène immatérielle du souvenir de l’enfant, l’artiste s’est inventé un langage naïf, sans fard. Il a la teinte de la chair rose et du bois sombre, et convoque inlassablement les mêmes métaphores.

Il y a ces rangées de poupées aux regards médusés, scrutateurs. Ici une tête qui flotte seule, inexpressive, ou bien un corps entier, sans bras et étrangement raide contre le mur. Ces poupées, comme autant d’avatars, sont placées derrière les barreaux d’une cage rafistolée ou même embouteillés, souvent recouvertes d’un fin linceul. Les pièces sont vides et une ampoule pend, mise à nue.

Il y a aussi des toiles de plus grand format. Mieux délimitées, plus techniques, l’artiste y inscrit son visage d’adulte, qu’elle place directement aux côtés de l’enfant qu’elle a été. Au miroir ou devant le chevalet, ces autoportraits émouvants racontent au présent sa fragile tentative de s’appréhender, de se dessiner, de s’aider.

La première exposition d’envergure a lieu à la Galerie Christophe Gaillard, à Paris.

Sources : https://laperle-paris.com/exposition/monique-gies. Date de création : 2025-10-17.

Photos

Monument

Inscriptions :

Monique GIES, 31.07.1934 – 03.03.2022.

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Date de la dernière mise à jour : 17 octobre 2025